Une nouvelle économie :
Les données, l’information et l’informatique « sortent » des basiques de l’économie « classique » qui s’appuie sur la propriété de biens et monnaies, stimule la concurrence et les luttes pour les acquérir.
Des sociétés ont exploité les singularités de ces biens nouveaux et de l’effet multiplicateur des « réseaux » pour, grâce à la technologie Internet, supplanter les limites des frontières des Etats ; elles profitent d’un vide juridique pour établir leur hégémonie.
Les USA, promoteurs et détenteurs d’une grande partie des technologies, s’arrogent, sans vergogne, des droits sur, potentiellement, le monde entier en donnant à leur législation un champ d’application extraterritorial, niant les souverainetés nationales ou communautaires, ainsi les règlements européens tel le RGPD.
Avec la crise du Covid-19 notre dépendance a été visiblement mise en évidence vis-à-vis de plusieurs « sources » de biens physiques et de dispositifs technologiques essentiels, vitaux peut-on dire.
La souveraineté des USA, première puissance mondiale, est largement mise en cause, ses « valeurs », qui font sa singularité, une illusion.
Une lutte pour l’hégémonie mondiale sur le « numérique » se développe quotidiennement entre la Chine et les USA. L’Europe, aujourd’hui « colonisée » par les technologies « numériques » d’origine américaine est sous la menace d’un chantage qui l’obligerait à se ranger, de grès ou de force, derrière les Etats-Unis pour des décisions qu’elle ne devrait pas cautionner. Voir les propos de Pierre Bellanger dans sa conférence à l’Institut National des Hautes Etudes de la Sécurité et de la Justice [1]
Le retour aux valeurs fondamentales :
Partout, à tous les niveaux opérationnels, les initiatives individuelles, la solidarité, les prouesses de petits groupes ont fait des miracles grâce à l’ Intelligence Collective mobilisée face à l’urgence.
Ces comportements, plus « naturels » qu’il n’y parait ou que l’on veut nous masquer peuvent nous aider à construire des modes de fonctionnement favorisant les synergies plutôt que la concurrence et les affrontements.
Les données, informations, « algorithmes » ont cette caractéristique nouvelle, inconnue de l’économie « ancienne » : quand on les confie à quelqu’un, on les garde aussi pour soi : il y a multiplication !
Permettre le partage, stimuler les échanges est la nouvelle « énergie » des organisations.
Selon le dicton US « Je te donne 1$, tu me donnes 1$, nous n’avons rien gagné ni l’un ni l’autre ;
je te donne une idée, tu me donnes une idée, pour peu que nos idées soient différentes, nous avons gagné chacun un idée ! »
Léonard de Vinci disait déjà : « Savoir écouter, c’est posséder, outre le sien, le cerveau des autres. »
Un corpus juridique nouveau est nécessaire pour l’espace du « numérique » :
Le numérique transcende les limites des états et des organisations (Communauté Européenne, ONU, OMC, Sociétés, Entreprises, consortiums, associations…) et diverses organisations, Etats mais aussi éditeurs de logiciels Microsoft, Google, … se sont arrogé un pouvoir, un « droit universel ».
Puisque la Cour Européenne de Justice, dans son jugement du 16 juillet 2020 a dénoncé le Privacy Shield qui permettait le transfert de données personnelles aux USA, considérant que les exigences de protection n’étaient pas suffisantes en regard du RGPD, nous sommes fondés à nous reposer quelques questions fondamentales.
Dans cet environnement nouveau qui défie nos modèles juridiques « anciens » il est grand temps de créer un « espace numérique » nouveau, indépendant de toutes les puissances actuelles, notamment des USA et de la Chine construit sur un ensemble de règles simples, cohérentes comme des algorithmes prouvés corrects, pouvant donner du sens à la formule « Code is law »
Cet espace de confiance, délimité par des « frontières » au sens de l’architecture RINA [2], reposerait sur quelques valeurs européennes à vocation universalistes, fondées sur la prééminence de l’individu, ses droits et devoirs dans ses interactions avec les autres (et peut-être avec la « nature », la terre).
Les règles de fonctionnement seraient édictées comme un tout cohérent, en identifiant les limites de validité afin de, toujours, rester en conformité (cf théorème de Gödel)
Entrer dans cet espace, en toute indépendance, pour y enregistrer des données, exécuter des applications, serait strictement volontaire et soumis, sans restriction d’aucune sorte à l’ensemble des règles. Toute faute se traduirait pas l’exclusion pure et simple et annule toute prérogative attachée et droits divers ainsi d’être éligible à certains traitements de données, par exemple de santé.
Une illustration avec les découpages des pays régions villes quartiers peut aisément s’envisager. Le cas ses « smart cities » est aisé à comprendre, il nous concerne tous.
L’IOT (Internet of Things) l’introduction de la 5G, débattue actuellement, notamment pour la sécurité des données sont un cas d’école accessible à tous en termes d’avenir de la société dans laquelle nous voulons que nos enfants et petits-enfants vivent
Un schéma ci-après donne une idée d’une topologie élémentaire des différentes « classes » d’appartenance à considérer : il est centré sur l’individu, le positionne par rapport à ses appartenances et les groupes avec lesquels il interagit.
Des extensions envisageables
Ces prémices d’une structure d’accueil pourraient :
- accueillir les « objets » qui structurent le mouvement du logiciel libre, la FSF,
- servir de « socle » juridique au projet franco-allemand GAIA-X présenté le 4 juin 2020 qui vise un « cloud » européen de confiance pour nos données et traitements, notamment de santé.
- constituer le socle d’une future « constitution » d’un « Etat Numérique » en cours d’émergence.
[1] Pierre Bellanger INHESJ 07 11 2020 Trois empires et un garde manger
https://www.arcsi.fr/doc/Trois%20empires%20et%20un%20garde-manger%20-%20INHESJ.pdf
[2] Pour une approche de l’architecture pour un Internet du futur proposée par le projet RINA, soutenu par Louis Pouzin, pionnier d’Internet voir mon article « RINA pour les nuls »
https://www.linkedin.com/pulse/rina-recursive-inter-network-architecture-pour-les-un-urban-galindo/
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Article publié dans la Newsletter Forum ATENA n°128 (sept.oct. 2020)
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