Les élections départementales françaises du mois de mars 2015 montrent de manière brutale que comme l'écrivait Howard Rheingold dans son livre concernant les communautés virtuelles à la fin des années 1990, les révolutions technologiques portent à la fois le meilleur et le pire, selon qu'on soit du côté de la vie ou du côté de la mort. Du développement ou du repli sur soi.
Ainsi, la vague actuelle de l'internet poussera, selon nous, le processus schumpétérien de destruction créatrice jusqu'à son paroxysme en provoquant enthousiasme chez les uns et effarement et angoisse chez les autres, la place privilégiée de la technologie dans les rapports sociaux de production, impliquant à la fois une réaffirmation de la domination du capital sur le travail et une libération extraordinaire des forces productives au service de l'humain.
Il semble que la nouvelle vague de l'Internet, (web 3.0) permette de relancer le développement capitaliste et de créer une aura communautaire (au sens de la collaboration) autour de ce noyau productiviste, ces nouvelles solidarités devenant alors la condition essentielle de la relance de l'économie capitaliste ! Les valeurs de la liberté et de la fraternité enfin réconciliées.
Prenons l'exemple de ce petit garage indépendant, un peu « le médecin de famille de mon automobile », d'un village au nord de Compiègne où le front national a fait 42%. Madame V, 56 ans, m'accueille lundi dernier et me déclare avec une immense tristesse dans le regard qu'elle est une morte vivante et qu'elle n'a plus rien à donner dans son travail. Je suis totalement interloqué, car cette femme était gaie, vivante et productive. Je lui demande alors si elle se sent victime d'une étatisation rampante qui fait descendre dans la rue de plus en plus de professions indépendantes, pour réclamer moins de charges sociales, moins d'impôts, moins d'état :
Vous payez trop d'impôts : non cela fait trois ans que nous ne sommes plus imposables !
Vous payez trop de charges sociales : non, pas trop
Vous payez trop de salaires et la législation du travail est trop favorable au salarié : non, je suis très heureuse d'avoir des salariés fidèles et compétents depuis plusieurs dizaines d'années.
Mais alors, que se passe-t-il, Madame V ?
Nous sommes victimes de l'organisation économique qui gouverne le monde. TOTAL, RENAULT, MON ASSUREUR et MON BANQUIER nous imposent des contraintes de valorisation et de financement des franchises qui nous tuent ! Il n'y a plus de solution pour nous et j'ai peur pour mon fils qui va reprendre le garage que son grand père et son père ont fondé et ont fait vivre depuis près d'un siècle.
Quelle ne fut pas ma stupeur et ma joie d'entendre la voie jeune et mal assurée de cet héritier nous dire que lui était optimiste, car il allait « virer » le plus vite possible les « affameurs » et construire son développement économique autour du principe communautaire, d'une solide documentation grâce aux revues techniques et d'une ou plusieurs imprimantes 3D pour faire les pièces qu'il ne pourrait pas acheter sur oscaro.com. J'ai déjà réparé ma Twingo, les pièces d'origine était 60% moins chères chez Oscaro que celles que m'impose d'acheter le constructeur !
Son outil de production pourrait devenir le cœur d'une communauté d'individus qui collaborent pour réparer leur véhicule. Une aura communautaire d'entraide et de solidarité pour redonner vie à un outil de production constitué par les investissements et par la compétence des techniciens du garage. Les valeurs de la solidarité de l'entraide au profit du développement d'un outil de production privée.
On est là bien loin du repli sur soi, de la non-vie, de la morne plainte des cohortes de morts vivants réclamant des mesures de protection de leur secteur d'activités (pharmaciens, notaires, libraires, taxis…).
C'est pourquoi, le contexte politique actuel IMPOSE que les intellectuels, les scientifiques, les chefs d'entreprises, les responsables syndicaux et les politiques conscients des métamorphoses économiques et sociales en cours s'investissent pleinement dans le débat et qu'ils proposent les transformations nécessaires pour accompagner ces jeunes qui portent en eux, intuitivement, les modèles de développement de cette nouvelle économie, qui pourrait enfin conduire à des lendemains qui chantent en réconciliant enfin la protection de l'individu et développement du collectif !