2020, c’est l’année de la COVID 19 , dans le monde entier ! et en France, c’est l’année de la 5Gite ( à prononcer comme méningite!

Comme le nuage de Tchernobyl en son temps, la 5G s’est arrêtée à nos frontières . Comme pour la COVID-19 il y a 3 mois, chacun et chacune est devenu un expert des télécommunications mobiles : la 5G tue les oiseaux et les insectes, la 5G est à l’origine de la COVID, la 5G va épuiser nos ressources énergétiques, la 5G va accroitre le dérèglement climatique, la 5G va faire progresser le nombre de cancers, la 5G va vous espionner,….

Rien n’est démontré rationnellement, et tous ces arguments font appel à l’émotion. Quelques remarques d’un professionnel du secteur :

  • Il y a cinquante ans, quand j’ai commencé dans les télécoms, le téléphone avait un cadran et un fil à la patte. Le sans fil relevait de la science-fiction. Si aujourd’hui, il y a plus de mobiles en France que d’habitants, c’est que cela doit être utile et satisfaire les besoins de la population. Et le mobile est bien complémentaire du fixe.
  • La 5G comme son nom l’indique porte sur la cinquième génération de mobiles, il y en donc eu quatre avant . Depuis les années 80, les télécommunications mobiles ont vécu une évolution continue qui a vu l’explosion des données et la marginalisation de la voix, devenue une application comme une autre. A la différence des générations précédentes, la 5G s’est caractérisée par une communication marketing hypertrophiée, qui promet depuis plusieurs années des services révolutionnaires, disponibles au mieux en 2027. Et on travaille déjà sur la 6G puisqu’il faut une dizaine d’années de travaux internationaux lourds et complexes pour aboutir à un consensus mondial sur une norme technique.
  • Sans évolution technologique, la 4G actuelle sera saturée dans 2 à 4 ans. Que faire ? Limiter les débits ? Réserver les terminaux aux plus riches ? Ou bien fournir un service médiocre à tous ? Pour simplement maintenir les services actuels, il est indispensable de faire évoluer la technologie ; c’est comme cela qu’est née la norme 5G, qui est une norme internationale industrielle, pas un outil politique.
  • Très vite, la 5G permettra plus de débits en utilisant mieux le spectre radioélectrique . Au fur et à mesure de sa mise en œuvre, la 5G offrira des services destinés aux professionnels : temps de latence très courts pour les usines et les processus, collecte de données issues d’objets connectés. Et de nouveaux services inimaginables aujourd’hui : qui aurait dit il y a dix ans qu’un petit libraire sur Internet deviendrait la plus grande compagnie mondiale ?
  • La 5G est un enjeu industriel majeur pour les constructeurs et opérateurs de télécommunications. Si la 2G (le GSM) était une initiative française et européenne, la 5G est clairement dominée par la Chine, qui a investi massivement. Les USA visent à dominer les logiciels et au milieu les Européens jouent leur jeu du mieux qu’ils peuvent, faute d’avoir formé suffisamment d’ingénieurs et investi dans les métiers du futur.

Personnellement, je pense que le progrès technologique est une bonne chose pour notre pays et pour le monde. Avec un commentaire rabelaisien « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme ».

Oui il faut développer au plus vite les infrastructures 5G. Mais il faut aussi réfléchir et travailler sur les usages et les inconvénients de ces nouveaux services numériques : équilibre entre vie privée et professionnelle, sécurité, économie, rôle de l’Etat,… Ce n’est pas en pratiquant un moratoire qu’on résoudra ces questions, ce n’est pas en dressant une ligne Maginot que nous aurons une meilleure vie. C’est en bâtissant les infrastructures numériques du futur (fibre et mobile), c’est en adressant les questions morales, politiques et réglementaires posées par le numérique, c’est en encourageant les entreprises à innover que nous vivrons bien au 21ème siècle.

N’ayons pas peur ! Allons résolument de l’avant !

Richard Toper / Président Setics / Président CREDO

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Article publié dans la Newsletter Forum ATENA n°128 (sept.oct. 2020)