Dîner networking “Les géants du numérique : un frein à l’innovation?”
23 janvier 2019 @ 19 h 00 min - 20 h 00 min
Forum ATENA a organisé un dîner networking le mercredi 23 janvier 2019 à partir de 19h00,
au Restaurant Les Noces de Jeannette (14 Rue Favart 75002 Paris).
Nous avons reçu à cette occasion Antoine Michon et Paul-Adrien Hyppolite, laissons leur la parole :
« Les géants du numérique » Fondation pour l’innovation politique – novembre 2018
Fortes d’un succès commercial sans précédent ces vingt dernières années, les entreprises phares de la « tech » ont accumulé d’immenses réserves de liquidités dans leurs trésoreries. À contrepied de leur image d’innovateurs de premier plan, elles ont fait le choix d’une gestion ultra-conservatrice de ce capital. Leurs trésoriers s’apparentent de fait davantage à des gestionnaires de méga-fonds obligataires sans risque que de fonds de roulement.
Ce phénomène de thésaurisation, sans égal dans l’histoire du capitalisme, prive l’économie de capitaux productifs et entretient la pénurie d’actifs sûrs. Des solutions existent pour ralentir cette accumulation de liquidités : renforcer le pouvoir des actionnaires dans l’allocation des profits afin d’encourager leur distribution, imposer aux « Big Tech » des contraintes propres à la régulation financière pour décourager la rétention de liquidités sur leurs bilans ou encore taxer davantage leurs profits pour limiter de facto le potentiel de thésaurisation à venir.
Mais ces solutions ont toutes pour limite de s’attaquer au symptôme plutôt qu’à la cause du problème : des profits anormalement élevés qui résultent aujourd’hui davantage d’une monopolisation croissante des segments clés du marché des nouvelles technologies que de la poursuite d’un processus d’innovation, aussi exigeant qu’il a été par le passé.
La mise en évidence de pratiques anticoncurrentielles, avérées ou soupçonnées, montre que les « Big Tech » n’hésitent plus à s’appuyer sur leurs positions dominantes pour évincer leurs concurrents, bloquer l’entrée de jeunes firmes innovantes et asseoir ainsi leur hégémonie aux dépens du reste de la société.
Le cercle vicieux est manifeste : leurs immenses réserves financières croissent à proportion de ces entraves concurrentielles en même temps qu’elles les facilitent. Derrière cet inquiétant tableau, se révèle en creux l’incapacité chronique des autorités antitrust à agir dans un secteur où les modèles économiques défient leurs grilles d’analyse habituelles.
Afin de recréer les conditions d’un environnement propice à l’innovation dans les nouvelles technologies, un durcissement et une adaptation de la politique de concurrence sont nécessaires. Cette transformation doit s’accompagner d’un renforcement des moyens et des compétences des autorités administratives, trop souvent dépassées par des pratiques anticoncurrentielles dont la technicité et la complexité ne font que croître. Enfin, des politiques proactives comme des mesures d’interopérabilité, de portabilité et d’ouverture des droits de propriété industrielle complèteraient utilement la démarche souvent réactive de l’antitrust.
Trouver le juste équilibre entre rémunération des innovateurs d’hier et soutien aux innovateurs de demain demeure un exercice extrêmement délicat. Mais il est clair que le laxisme des autorités antitrust et la passivité des régulateurs en matière d’édification des normes et de schémas d’interopérabilité mettent en péril l’entrée sur le marché de jeunes entreprises prometteuses.
Paul-Adrien Hyppolite & Antoine Michon
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Antoine Michon et Paul-Adrien Hyppolite sont les auteurs de deux ouvrage :
“Les géants du numérique : magnats de la finance / un frein à l’innovation”
publiés par la Fondation pour l’innovation politique (fondapol.org)
La première partie, Les Géants du numérique (1) : magnats de la finance, analyse l’influence gra
* Les auteurs de ce travail sont Paul-Adrien Hyppolite, ingénieur du corps des Mines, diplômé de l’École normale supérieure et de l’École polytechnique, chercheur invité à Harvard University, et Antoine Michon, ingénieur du corps des Mines et diplômé de l’École polytechnique.