Que penser du Bitcoin ? un avis personnel, éventuellement « rétrograde », assumé
Par Jean-Jacques URBAN-GALINDO, administrateur Forum ATENA – juin 2022
“Il est une chance que les gens de la nation ne comprennent pas notre système bancaire et monétaire, parce que si tel était le cas, je crois qu’il y aurait une révolution avant demain matin.” Henry Ford
Après la deuxième guerre mondiale les USA ont pris le leadership mondial avec les accords de BrettonWoods. Le système monétaire mondial s’est articulé autour du dollar avec des taux de change fixes, la convertibilité du dollar en or faisait partie des fondements du système. Le 15 Août 1971 Richard Nixon décidait, unilatéralement, la fin de cette « garantie », ouvrant la porte aux taux de change flottants et à la spéculation financière sans limite.
On se souviendra qu’il y a un siècle, en 1921, Henry Ford proposait la création d’un système monétaire fondé sur l’énergie en remplacement de la convertibilité en or. Certains y voient une parenté avec le Bitcoin et les autres crypto-monnaies qui nous ont envahis.
L’actualité a remis le projecteur sur les crypto-monnaies avec :
- la « volatilisation » de Terra Luna, réputée « stable », une caractéristique qui devait garantir contre les fluctuations ordinaires, excessives, de ces « monnaies »,
- La course aux alternatives de « monnaies numériques » par les grands émetteurs des devises principalement dollar, euro, yuan qui se disputent, de plus en plus vigoureusement, leurs zones d’influence.
Marc-Olivier Strauss-Kahn Directeur Honoraire de la Banque de France (BDF) positionne les monnaies émises par les Banques Centrales et les autres, dont la monnaie scripturale émise par les banques
Des analyses et réflexions personnelles
Il y a quelques années, quand le Bitcoin a commencé à faire l’objet d’articles, j’ai entendu le mathématicien JP Delahaye en décrire le mode de fonctionnement dans une conférence donnée à l’institut Fredrick Bull. Les principes avancés m’ont quelque peu étonné, notamment le mécanisme fondant la confiance et la consommation de ressources de calcul.
J’ai donc analysé le texte fondateur publié anonymement, sous un nom d’emprunt Satoshi Nakamoto « Bitcoin: A Peer-to-Peer Electronic Cash System »
https://bitcoin.org/bitcoin.pdf
Je trouve toujours intéressant de lire 10 ans ou 20 ans plus tard ce qui a été annoncé des évolutions à venir de telle ou telle technologie. Sur les crypto-monnaies les choses vont tellement vite qu’en quelques années les évolutions ont été fulgurantes. J’applique cette analyse à mes propres interrogations sur ce « phénomène » en reprenant certains de mes écrits :
Début 2018 j’apportais quelques commentaires sur Linkedin, je les reproduis ci-après :
Le 27 février 2018 à la courte vidéo de la BBC « Blockchain for Dummies » https://www.linkedin.com/feed/update/urn%3Ali%3AugcPost%3A6373875375512129536
Je notais : « Et les blocs qui enregistrent et valident les transactions Bitcoin sont validés en 10 minutes environ ! »
Puis le 03 mars 2018-à un article « Bitcoin est-il « si difficile à comprendre » ?
https://www.linkedin.com/feed/update/urn%3Ali%3Aarticle%3A7326716789385485609/
« Je cherche, sérieusement, à comprendre le “phénomène”. Dans le cas spécifique du Bitcoin je décompose mes questions en 2 sous-questions inter reliées:
a) un algorithme d’une blockchain (j’ai vu qu’il en existait d’autres) fondé si j’ai bien compris sur l’algorithme réparti défini dans la publication “Bitcoin: A Peer-to-Peer Electronic Cash System” de “Satoshi Nakamoto” (personne inconnue) publié en octobre 2008. Je suppose (n’ayant vu aucun texte correctif) que l’algorithme du code open-source distribué en 2009 lui est fidèle.
De ce que j’ai compris (je peux faire erreur) la résistance à la fraude, la résilience, est fondée sur un dispositif de vote qui apporte une confiance “probabiliste”. Personnellement cela ne me suffit pas et j’attends une “preuve” plus formelle comme celles que nos chercheurs en langages formels arrivent à produire.
Je suis d’autant plus dubitatif que je n’ai rien vu qui puisse intégrer le fait que les nœuds du réseau étant distants, un temps minimum de propagation des informations entre les nœuds soit pris dans le “modèle logique”.
Par ailleurs la consommation de ressources par les “mineurs” et le temps de validation d’une page (10 sec ?) me semblent mettre en péril la robustesse de l’algorithme proposé pour une utilisation à grande échelle.
Il en résulte un “débit” en nombre d’écritures validées / sec que j’ose qualifier de ridicule, d’autant plus que les règles de priorité de traitement ne garantissent pas la validation d’une écriture dans un temps borné.
b) sur la “valeur” du Bitcoin “unité”, telle qu’elle résulte de la loi de l’offre et de la demande ne peut qu’augmenter avec son succès puisque le nombre total de bitcoins à terme est fixé, que le rythme de création des bitcoins est faible et ne pourra que se limiter encore quand on approchera du nombre limite fixé (on se demande d’ailleurs pourquoi),
Si le succès de son usage comme moyen d’échange venait à se développer, comme j’ai cru comprendre que c’était l’objectif, il me semble que la “valeur” unitaire ne peut que monter pour assurer le volume croissant des échanges avec un nombre de bitcoins limité.
Dès lors, la valeur augmentant presque mécaniquement à mon avis, la tendance à en faire une valeur refuge va être plus forte, la demande spéculative pour thésaurisation va prendre le pas sur l’usage pour échanges et la bulle va monter, jusqu’à éclatement.
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